La romancière ontarienne Emily Schultz fait ici le nécessaire pour qu’on cesse de croire que les « hommes préfèrent les blondes », pour reprendre le titre du célèbre roman (1925) d’Anita Loos, dont la suite s’intitulait malicieusement Mais ils épousent les brunes (1928). Dans Les blondes, le VSH, virus n’affectant que les femmes aux cheveux dorés ou clairs, transforme celles-ci en tueuses hystériques. Le roman adopte le point de vue de Hazel Hayes, une jeune femme rousse (donc suspecte), aux premiers temps du « fléau blond », alors que les autorités américaines et canadiennes instaurent un dispositif de sécurité qui fait penser aux mesures mises en place pour bloquer la propagation du SARS ou, plus près de nous, du virus Ebola.
Présenté de la sorte, Les blondes semble relever de la fiction spéculative, un domaine particulièrement propice aux intrigues à teneur apocalyptique si l’on en croit l’actualité littéraire. Témoins, le dernier Antoine Volodine, Terminus radieux, qui vient de remporter le prix Médicis 2014, ou le tout récent Maddaddam de Margaret Atwood, qui clôt une trilogie post-cataclysmique. Il ne s’agit pourtant que d’une facette parmi d’autres du roman de Schultz. Les blondes, c’est avant tout l’histoire d’une jeune Torontoise partie effectuer un doctorat en esthétologie à New York après avoir eu une liaison avec Karl, son professeur, qui paraît pressé de l’écarter de sa vie. Loin de chez elle, alors que l’Amérique plonge dans une paranoïa qui ne nous est que trop familière, Hazel s’attache peu à peu à cet enfant dont elle n’a pas voulu, mais qui se forme à l’intérieur de son ventre. Une alliée improbable surgit sur son chemin : Grace, l’irascible épouse de Karl, qui est sans doute le personnage le plus coloré du livre de Schultz.
Sur fond de roman conjectural, Emily Schultz bâtit ainsi une intrigue qui s’essouffle par endroits, mais qui n’en propose pas moins un regard savoureux sur la condition féminine, la maternité, la beauté et les rapports homme-femme.
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